Association pour la Sauvegarde
du Patrimoine Culturel
des Juifs d’Égypte

19/10/2013 – Christian DESTREMAU

Le 19 octobre 2013 à 15 heures à la Maison des Associations du 12ème nous avons reçu Christian Destremeau, historien auteur de :  « Le Moyen Orient pendant la seconde guerre Mondiale  » (Aux Éditions « Perrin »)

Le sujet est passionnant : « Le Moyen Orient pendant la Seconde Guerre Mondiale » En ce premier jour de vacances scolaires, synonyme de départs, il y a tout de même de nombreux membres de l’Association et un certain nombre d’autres personnes informées par Akadem de la tenue de ce cercle de lecture.

Notre jeune auteur et conférencier se déclare impressionné par son auditoire et nous précise ensuite sa démarche en vue d’aboutir à l’ouvrage de 470 pages qu’il nous présente.

La Deuxième Guerre mondiale a été perçue au Moyen-Orient comme un conflit entre nations européennes. Christian Destrémau a bien essayé de chercher des sources d’information ou des témoignages locaux, mais le résultat s’est révélé décevant. Ces nouvelles proviennent pour l’essentiel des archives officielles britanniques (que notre conférencier exploite avec facilité vu son excellente connaissance de l’anglais) y comprises celles des services secrets désormais déclassifiées.

Les témoins encore vivants se font rares et n’ont qu’une vue partielle du Moyen-Orient pendant la guerre ; pour les anglophones il s’agit d’El Alamein, pour les Français de Bir-Hakeim, pour les Allemands de l’Afrika Korps…

Hitler s’intéressait peu au Moyen-Orient au moins au début de la guerre. Il y a été poussé du fait des ambitions coloniales de l’Italie, qui convoite l’Égypte à partir de sa possession libyenne. Mais Mussolini attaque, contre l’avis du général Graziani, gouverneur de la Libye. Ce dernier avait bien raison de déconseiller Mussolini de loucher vers l’Égypte, clef de voûte du Moyen-Orient.
Les Italiens seront repoussés par l’armée britannique et ne doivent leur salut qu’à l’intervention de l’armée allemande.

Le Moyen Orient pendant la seconde guerre Mondiale

L’Égypte est indépendante depuis 1922, mais on dit couramment qu’il y existe trois pouvoirs : le Roi, le Parlement et…l’Ambassadeur de Grande-Bretagne. Les Britanniques sont sur leurs gardes car le roi, qu’ils surveillent de manière obsessionnelle, est entouré d’amis et de conseillers italiens. Les jeunes officiers de l’armée égyptienne sont nationalistes et louchent vers l’Allemagne, qu’ils imaginent pouvant les aider à se débarrasser de la présence anglaise. Abbas Hilmi, descendant de l’ex khédive ottoman destitué par les Britanniques en 1914, est influent et ne cache pas sa sympathie pour les Allemands. Seuls les Frères Musulmans demeurent neutres.

Churchill pense que l’Égypte est le lieu idéal (« le ventre du crocodile ») pour combattre les Allemands qu’il ne peut attaquer frontalement. Mussolini va lui en donner l’occasion par sa tentative d’invasion de l’Égypte. Rommel vient au secours des Italiens en février 1941 et repousse les Alliés. Les événements vont se précipiter simultanément avec le coup d’état en avril de Rachid Ali à Bagdad. Les Britanniques prennent ceci très au sérieux et déplacent leurs chars de Palestine jusqu’en Irak. Hitler va soutenir la révolte irakienne par la directive 30, mais celle-ci n’est édictée que 7 semaines plus tard ; l’envoi d’une aide armée aux putschistes d’Irak est mal coordonnée tant avec les révoltés qu’avec Vichy (soucieux de sa souveraineté sur la Syrie) et les Italiens, peu enthousiastes. De plus, Hitler est surtout préoccupé par l’invasion de l’URSS qu’il projette un mois plus tard.

Christian Destremau cite au passage le pogrom anti-juif du 1er juin 41 à Bagdad, aux causes mal connues qui fit 250 victimes. Le calme revient et c’est ce que cherche Churchill au Moyen-Orient. Le livre blanc de 1939 limitant l’immigration juive en Palestine est censé apporter une solution aux troubles intercommunautaires de 37-38. Un des personnages de cette histoire est Hadj Amin-al-Husseini, mufti de Jérusalem, qui est le leader anti-juif, propagandiste redoutable. Il fuit en Irak, puis en Iran, avant de se retrouver à Berlin. Ses propos séduisent Hitler, mais les Allemands vont progressivement le trouver corrompu et incapable d’organiser une action d’envergure.

D’une manière générale, d’après notre conférencier, l’impact local de cette propagande sur les populations du Moyen-Orient est peu important.
Au niveau militaire, Rommel marque des points en s’emparant de Tobrouk en juin 1942, faisant prisonniers plus de 30000 soldats britanniques et alliés. Churchill est catastrophé, mais va se servir de cette défaite en influençant Roosevelt (il met en scène cette nouvelle qu’il apprend alors qu’il se trouve en conférence dans le bureau ovale de la Maison Blanche) de ne pas envisager de débarquement en Europe, que les Américains souhaitaient pour 1943. Ces derniers vont approvisionner massivement les Anglais en armes. Rommel, qui était en vue d’Alexandrie en septembre 1942, sera battu à El-Alamein. C’est le début de la fin de l’Afrika Korps qui va se retirer peu à peu et faire sa reddition en mai 43 en Tunisie.
Les gouvernements des pays du Moyen-Orient ont pris une position neutre, puis ont fait le « bon choix » voyant la tournure que prenait la guerre. Mis à part le mufti de Jérusalem très engagé aux cotés des Allemands, les militaires arabes, par opposition à la Grande-Bretagne, ont admiré le militarisme allemand dont ils ont cherché à se rapprocher heureusement sans suite, à l’exception du coup d’état irakien , lui aussi sans succès.

De nombreuses questions fusent accompagnées quelquefois de témoignages.

Ceux-ci concernent le rapport entre les jeunes officiers égyptiens et l’Allemagne, les conflits en Égypte entre Français gaullistes et Français pro-Vichy, la brigade juive de l’armée anglaise…

Le sujet est très vaste et notre conférencier le maîtrise à fond. Il faut néanmoins mettre fin à cette conférence qui se termine par la séance de dédicaces de l’ouvrage présenté et le pot amical traditionnel.

Victor Attas, 26 novembre 2013

ANNONCE DE LA CONFÉRENCE

A la fin de la guerre, Hitler regrettait de n’avoir pas suffisamment utilisé l’Islam et certains alliés arabes dans son combat. Simple illusion ou réalité ? L’idéologie nazie a-t-elle vraiment trouvé des relais importants en Iran, en Palestine, en Irak ou en Egypte ? Le Moyen Orient, ses dirigeants, ses populations, qui se trouvaient encore dans une situation quasi coloniale, espéraient pouvoir rester à l’écart d’un conflit perçu comme européen. Mais la région a pris une place très importante durant les deux premières années de la guerre dans la stratégie des belligérants en raison des ambitions coloniales de l’Italie – qui eurent comme conséquence l’intervention de l’Allemagne – du role du canal de Suez et des puits de pétrole, considérés et comme vitaux par la Grande-Bretagne. La région est alors devenue un « théatre d’opérations », et il a fallu faire des choix. Pour les pays arabes, la fin de la colonisation, sous ses différentes formes, était désormais inévitable, malgré les combats d’arrière-garde de la Grande Bretagne et de la France. En Palestine, la Shoah donnait à la lutte des Juifs pour la création d’Israel toute sa légitimité, tandis que les Etats-Unis nouaient avec l’Arabie Séoudite une relation stratégique qui, encore aujourd’hui demeure le deuxième pilier de leur politique dans la région. De façon imprévisible, la guerre a eu donc un impact considérable et a modifié durablement le visage du Moyen Orient.

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