« Le sauvetage des enfants pendant l’occupation dans les Maisons de l’OSE » Par Kathy Hazan, édition bilingue Somogy, 2009 (OSE, Œuvre de secours aux enfants)
Un public nombreux était venu écouter la passionnante conférence de Madame Kathy Hazan qui nous présenta son dernier livre (bilingue) sur le sauvetage des enfants juifs pendant la seconde guerre mondiale dans les Maisons de l’OSE.
Madame Kathy Hazan est historienne et responsable du département « Archives et histoire de l’OSE ».
Survol de l’histoire de l’OSE : L’association fut fondée par des médecins en 1912 à Saint-Pétersbourg pour aider les populations juives défavorisées. En 1923, l’association s’installa à Berlin, puis elle se réfugia en France en 1933, devant la montée du nazisme. Depuis cette époque, elle n’a plus jamais quitté la France.
Déjà avant la guerre, devant l’ascension d’Hitler au pouvoir, l’OSE s’occupa activement des réfugiés juifs venus essentiellement d’Allemagne et d’Autriche et les hébergea souvent dans ses Maisons. Pendant la seconde guerre mondiale les Maisons de l’OSE hébergeront des enfants et surtout depuis 1942-3, l’OSE organisera de très importants sauvetages d’enfants.
Rappelons qu’à la fin des années 50 et dans les années 60, l’OSE a pris en charge des enfants juifs venus d’Afrique du Nord et d’Égypte.
Les pôles actuels de l’OSE sont l’accueil médical, l’enfance, la gérontologie et la mémoire. L’OSE anime plus de 600 employés et bénévoles.
La seconde guerre mondiale : Dès le début de l’occupation allemande, l’OSE contribua énormément au sauvetage des enfants juifs menacés de déportation, mais nous verrons comment cette action passa d’une certaine forme de légalité à l’action clandestine dès la fin 42 et surtout 1943.
Au début de l’occupation les allemands obligèrent certaines grandes organisations juives à se fédérer sous une direction unique l’UGIF (Union des organisations juives de France). Il faut préciser que l’UGIF, bien que suscitée par l’occupant allemand, ne fut pas « collaborationniste » (comme le furent assurément les Conseils juifs en Pologne), mais elle fut « légaliste » et le resta jusqu’à la fin de la guerre. Ce « légalisme » eut un coté ambivalent et fut à double tranchant : d’une part, il créa involontairement des « souricières » pour certains enfants juifs qui furent ainsi facilement déportés, et d’autre part il aida souvent à organiser des systèmes de sauvetage (A ce sujet, il faut citer l’épisode des enfants «bloqués » qui se trouvèrent en 1942 avec leurs parents au camp de Drancy. L’UGIF parvint à sortir ces enfants « bloqués » du camp de Drancy et les confia à l’OSE qui put ainsi les sauver).
A cette époque l’OSE travailla aussi régulièrement avec l’UGIF dans le cadre de dispensaires d’enfants (exemple du dispensaire pour enfants juifs étrangers de la rue des Francs Bourgeois).
Dès 1940 l’OSE fonda 14 Maisons d’Enfants, la quasi totalité d’entre elles étant située en zone Sud, notamment dans la Creuse, la Haute-Vienne et le Var. Il faut souligner le véritable projet pédagogique de ces Maisons qui tout au long de la guerre prodiguèrent aux enfants un environnement juif et tout simplement humain d’une grande qualité, ce qui contribua à leur éviter au maximum les traumatismes liés à leur situation et leur permit de « mieux retomber sur les pieds » à la suite de la guerre.
L’action de l’OSE était différente selon qu’on était en zone Nord ou en Zone sud (dite « libre »). Dans cette première époque de la guerre, l’Œuvre de Secours aux Enfants collabora avec d’autres organisations juives comme les « Éclaireurs Israélites de France », qui auront un rôle assez important, rôle qui se poursuivit par la suite (voir chapitre suivant).
Les rafles de 1941-1942 : Il y eut une époque charnière, qui est celle des « rafles ». Une petite rafle eut lieu le 14 mai 1941, avec l’ouverture des camps de Pithiviers et de Beaune-la-Rolande, antichambres de la déportation. Mais la rafle la plus dramatique fut celle du 16 juillet 1942. Cette rafle détermina l’OSE à entrer dans une forme de clandestinité et à avoir une action plus indépendante de l’UGIF même s’il subsista entre eux des axes indispensables de collaboration.
C’est à cette époque aussi que vont naître un certain nombre de réseaux de sauvetages d’enfants importants comme « le Circuit Garel », dont il sera question dans le paragraphe suivant.
L’époque de l’action clandestine dès 1943 : Dès lors que la menace se fit de plus en plus lourde, l’OSE s’organisa de plusieurs façons différentes : d’une part en établissant une très importante organisation de « faux-papiers » pour les enfants, d’autre part en maintenant – mais avec une très grande « prudence » les Maisons d’Enfants. Cette prudence n’empêcha malheureusement pas la dramatique rafle d’enfant d’une Maison de l’OSE, en avril I944, la rafle des enfants d’Izieu dans l’Ain, organisée par Klaus Barbie.
L’établissement de systèmes de sauvetage plus sûrs devint indispensable, et le principal fut le transfert des enfants à l’étranger ; ce fut l’immense tâche du « Circuit Garel », auquel collaborèrent les Éclaireurs Israélites de France. Les enfants étaient acheminés essentiellement dans deux pays limitrophes non occupés qui étaient surtout la Suisse et l’Espagne. Quelquefois, ils furent même acheminés aux Etats-Unis. Durant cette période les fonds nécessaires venaient du « Joint » américain et passaient essentiellement par la Suisse. Près de 2000 enfants furent ainsi sauvés par cette fuite à l’étranger.
Par ailleurs, un milliers d’enfants juifs furent confiés à des familles catholiques ou en institutions religieuses. Il faut absolument souligner la mobilisation massive des populations françaises non juives.
Les questions et témoignages qui suivirent l’exposé : Un témoignage intéressant fut celui de José Guetta, qui – réfugié d’Égypte dans les années 50 – séjourna dans une colonie d’enfants de l’OSE.
Il fut aussi question de l’aide de l’OSE par le « Joint » des USA. Mme Hazan précisa à ce sujet qu’à partir de 1949, le « Joint » passa la main au FSJU.
En ce concerne les relations de l’OSE avec l’UJRE (Union des Juifs pour la Résistance et l’Entr’aide, organisation proche du Parti Communiste), Mme Hazan indiqua qu’il y eut des relations cordiales entre les deux organisations, mais que les sauvetages d’enfants n’étaient pas l’axe principal de l’UJRE.
En conclusion, l’action de l’OSE pour le sauvetage d’enfants juifs pendant la guerre fut importante car cette association sauva 5000 enfants, et en aida 6000.
Le livre de Kathy Hazan est un magnifique album des enfants sauvés dans les Maisons de l’OSE, mais il est surtout un très important recueil de témoignages. Il est préfacé par Serge Klarsfeld.